Maison des arts de Créteil -  Les Mesnographies
photographie

Les Mesnographies

Biennale Photoclimat

saison 25.26
20sept.—19déc. 2025
vernissage 14.10 à 18h30

HODA AFSHAR

À l'intersection de l'image conceptuelle, de la mise en scène et du documentaire, la pratique artistique de Hoda Afshar explore la représentation du genre, de la marginalité et du déplacement. Attirée initialement par le potentiel de l'image documentaire pour mettre au jour des réalités cachées, elle s'engage également à critiquer la complicité entre le médium photographique et les enjeux de  pouvoir. De par sa propre expérience de la migration et du déplacement culturel, le travail d'Hoda prend l'intrusivité de la caméra comme point de départ pour déconstruire la relation entre la vérité, le pouvoir et l'image, tout en perturbant les conventions traditionnelles de la création d'images. 

Cette série de photographies a été réalisée en réponse au soulèvement féministe qui a débuté en Iran en septembre 2022, après la mort de Jina Amini, une jeune femme de 22 ans arrêtée par la police des moeurs iranienne pour ne pas avoir porté correctement le hijab. Les photographies d'Hoda Afshar constituent ici un hommage, mais aussi un témoignage de l'action collective et du deuil collectif. Les femmes présentent sur les photographies sont, comme Hoda Afshar, des iraniennes-australiennes qui ont observé les manifestations se dérouler de loin. Vêtues de noir, elles se regroupent et tressent les cheveux des unes des autres. Cela fait directement allusion aux images diffusées sur les réseaux sociaux de femmes en Iran qui, de manière dé!ante, se débarrassent du voile, ainsi qu'à une pratique courante parmi les combattantes kurdes qui tressent les cheveux des unes des autres avant d’aller au combat contre l'État islamique. Avec leurs visages principalement cachés et leurs dos tournés,  les sujets d'Hoda Afshar sont les substituts de leurs courageuses soeurs iraniennes. Les colombes ancrent cette analogie : lorsque des manifestants sont tués en Iran, la famille et les amis relâchent des oiseaux dans le ciel. Les brins d'une tresse sont appelés pchesh-e-moo, ce qui signi!e le tournant ou le pli des cheveux. Une révolution est un tournant, mais elle est toujours  marquée par la perte. 

FRÉDÉRIQUE BARRAJA

De la peinture à la photographie, du documentaire à la fiction, de l’écriture à l’image, c’est une  carrière d’artiste que Frédérique Barraja mène depuis 25 ans. Elle débute sa carrière de photographe dans l'industrie du disque, puis dans la photographie documentaire en parcourant le monde, réalisant des images motivées par la défense des droits des femmes. En 2023, le festival VISA pour l’image  sélectionne Frédérique pour sa série puissante sur l’inceste : " L’inceste est un crime au même titre  que les crimes de guerres". Son engagement féministe ne date pas d’hier. En 2011, elle réalise un documentaire pour Canal plus : " Les Branleuses!" sur la masturbation féminine. Son exposition éponyme est par la suite exposée à la galerie Slott, au Paris photo 2012 et dans des galeries de Los  Angeles. Elle a également travaillé pendant 15 ans dans le monde du cinéma comme photographe de plateau. Cette période ponctuée d’une trentaine de films (de Walter Salles, Olivier Assayas, Cuaron, Hervé Mimran, Luc Besson, Olivier Baroux, Xavier Gens, etc) renforce sa passion du cinéma et de l’image. En 2020, elle réalise un court-métrage : "Comme une envie" (France 2), puis un deuxième,  "Un homme qui m’aime", multi-primé, sur les violences faites aux femmes. Dans le même temps, elle réalise aussi quelques publicités, pour La Fondation L’Oréal, ou celle de Ruban Rose. Elle prépare son premier long métrage chez Polaris films.

Le travail de Frédérique Barraja met en lumière des sujets qui lui tiennent à cœur. Ainsi l’urgence de raconter l’histoire de Julie s’est imposée à elle : son parcours fait de solitude, de courage et de dignité a forcé son respect. À 30 ans : cancer du sein droit triple négatif, mutation génétique, ablation des ovaires. À 40 ans : cancer du sein gauche triple négatif, chimio, double mastectomie. Garder l'espoir, regarder devant. Prendre le temps dourcer dans e se ressla Nature, puiser dans les éléments l'énergie nécessaire pour se battre encore une fois. Dans ses images, Frédérique a voulu montrer ces lieux qui ont donné à Julie la force et l’ont sauvée : la mer, la montagne. Le souhait de la photographe était de mettre en image ses mots, mais aussi ses maux, son torse en carton, les épines qui la brûlent, tout son corps qui lui fait mal. L'eau de la Bretagne est froide, mais la Nature recharge son corps et son esprit. « L'océan me nettoie, les algues me coiffent, la montagne pousse mes limites ». Frédérique immortalise ses petits seins enlevés quelques mois plus tard. Elle dévoile son célibat, douloureux après la maladie. La difficulté de montrer ce corps mutilé, la terreur dans les yeux du premier homme devant lequel elle ose se dénuder, et qui fuit, ne laissant que l’ombre de ses mains sur son passage.

 

HENRIKE STAHL

La marge, l’entre-deux, Henrike Stahl  en fait un langage. Elle, l’Allemande  qui a longtemps oscillé entre Paris et  Berlin sans choisir de port d’attache. Elle aime porter un regard aussi cru que délicat sur les territoires et les identités en transition. Que ce soit à travers ses séries Mon Roi, Ma Reine, qui sublime les Dyonisiens sans trahir leur décor ou Macadam Cowboy, qui révise la notion de masculinité dans une société où le genre engendre des idées un peu trop normées. Chez Henrike Stahl, la photographie est une manière de dialoguer, de tisser des passerelles entre des mondes. Des mondes que les préjugés tendent à éloigner. Ce qu’exige son travail, c’est un sillon pour rapprocher les personnes, faire tomber les murs et défricher de nouveaux chemins de pensées. Henrike vise également à construire d’autres façons d’habiter la photographie : évincer les cadres, maximiser les formats, les déployer dans l’espace afin que l’on puisse se mouvoir au milieu des tirages. Importer la marge au centre des considérations n’est pas seulement une métaphore chez cette photographe, qui affirme toujours à travers son travail que la pluralité est gage de richesse. 

Tu es devant, c’est le moment : sauter ou bien se retourner ? Le courage de dire oui comme celui de dire non. Ce moment, c’est ton choix, le courage d’être toi, celui qui te fait vivre, celui qui t’appartient, celui qui dé#nit ta personne, celui à qui tu parles de toi à toi. Grand saut où petits pas d’oiseaux, il est déjà trop tard, tu es déjà dans l’air.

Cette installation, inédite et jamais montrée, ne pourrait pas exister sans ce lieu, ce lac, et n'aura probablement plus lieu ailleurs. Il y a cette femme enceinte : elle ne sait pas qui sera l’enfant qu’elle porte. Aucune femme ne sait qui sera l’enfant qu’elle porte. Être enceinte c’est comme sauter dans l’eau : on ne sait pas. Cette femme enceinte, c’est Henrike Stahl. Elle porte Rio. Sur la photo, elle ne sait pas encore le handicap que son enfant portera. Elle ne sait pas non plus la personne inventive et extraordinaire qu’elle sera. Rio est une enfant courageuse. Ces images, ce sont celles du courage. Le courage de Rio et de son amie Anna, mais aussi  un peu de celui de Henrike. Cette installation immersive est donc un hommage au courage, une incitation à sauter dans l’inconnu, à plonger dans la vie comme dans l’eau. C’est aussi le courage des femmes, des mères, des artistes. Car toute création est un plongeon dans le vide.

PIERRE & FLORENT
Pierre Larose et Florent Darthout

Photographes plasticiens en duo depuis 2010, notre histoire prend forme autour d’une passion commune, celle de vivre et de faire vivre des expériences personnelles intenses, les documenter par l’image et les partager. Avec notre premier projet performance Heroes under the waves, exposé entre 2010 et 2013 par la galerie Pristine au Mexique, nous avons expérimenté la fiction et la performance autour de la perte de sens des nouvelles générations et l’avènement de nouveaux Hérauts. Dans un second projet d’autoportraits et de natures mortes intitulé Les idiots de l’image, nous nous jouons des clichés identitaires et de l’exotisme artificiel. De 2019 à 2024 nous développons le projet Mémoire Habillée. De Onomichi à la baie de Somme, en passant par Oradour-sur-Glane et ses descendants (avec la série Champ de foire), nous interrogeons la mémoire individuelle et collective au travers d'une collecte de témoignages et de portraits intimes en accumulation de vêtements, d’objets et de souvenirs. La série sera exposée à plusieurs reprises : aux Rencontres Photographiques du 10e à Paris, durant les Rencontres Photo d’Arles (off) mais aussi au Festival des Photaumnales à Beauvais.

Se vêtir, souvent, c’est choisir la manière de se présenter au monde. Métier, appartenance, déguisement, camou"age ou encore acte politique, le vêtement est omniprésent dans nos vies. "Fenêtre" sur l’intime de ceux qui la peuplent, cette série de portraits est aux frontières de la performance, du documentaire et de l'auto-#ction. Le dispositif d’accumulation est identique pour tous. Le choix des vêtements et objets leur appartient, tout comme celui du lieu de la prise de vue. La composition de l’accumulation se fait à six mains. Chacun pose au sommet de son dôme, porté par sa mémoire, régnant sur ses souvenirs et leurs vestiges. Les prises de vues sont contextuelles, souvent préparées de longue date, parfois improvisées. Les histoires se racontent dans les détails, les symboles et les anecdotes que le spectateur découvre par l’observation minutieuse de l’image. Dans les plis, les coutures et les drapés, l’imagination prend des chemins inattendus, cherchant au-delà des apparences.

 

Illustration © Henrike Stahl.

Hall

Partenaires